Gérard Pichot raconte le parachutage de la nuit du 14 au 15 juin 1943 à Tourtenay.
Témoignage recueilli en 2006 au Centre Régional "Résistance & Liberté"
Extraits du témoignage de Gérard Pichot
Source : Conservatoire de la Résistance et de la Déportation des Deux-Sèvres et des régions limitrophes
« Non, c’était la grande surprise. On s’est tout de suite aperçu que nous étions dans une action secrète et du fait que nous allions avoir connaissance de ce travail, on était destiné à mourir pour ne pas transmettre d’information nulle part. Nous en avions conscience. Comme on savait à Buchenwald que Dora, on ne savait pas ce que c’était mais on disait toujours que ceux qui étaient partis revenaient morts. On savait que c’était dur, mais quand on est arrivé on a compris ce qu’était Dora. Surtout quand on est allé dans le tunnel. Ce fut une impression d’espionnage. »
« […] comme je n’avais pas de qualification particulière, j’ai voulu me faire passer comme mécanicien mais quand on m’a donné une lime, un pied à coulisse pour faire une queue de ronde, ils ont bien vus que je n’étais pas capable alors ils m’ont affecté au transport-colonne que l’on appelait les kommandos Stavaski. Il y en avait plusieurs appelé 1, 2, 3. On changeait selon les besoins. On travaillait pendant 12h. J’ai été affecté au block 8 […] donc tout le mois de novembre, décembre et janvier j’ai travaillé à ce transport-colonne qui était un kommando très dur où il fallait transporter les carcasses de V2 à l’épaule. Nous étions 6 de chaque côté. Les carcasses étaient stockées dans un champ en contre bas du tunnel ; elles étaient debout, rangées comme des tuiles, emboitées les unes dans les autres et tenues par des perches en sapin. »
« Les perceuses, les trous de travers, les coups de travers. Mais c’était surtout les techniciens car il y en a des techniciens de grande qualité qui ont été déporté là, ils trafiquaient les données, les études. Il y avait des gars qui étaient là qui étaient aussi compétents que l’État major allemand.
Rien que de se planquer pour ne pas travailler c’est du sabotage. Apporter une pièce, en faisant semblant de ne pas avoir compris, au mauvais endroit. Tout allait de travers. On faisait semblant de forcer alors que nous ne forcions pas. Le tout intelligemment. Le tour que nous avons rentré dans ce hall et que nous avons cassé. Alors il fallait tourner à l’équerre pour rentrer dans le hall ; le hall était un petit peu plus bas, alors il y avait une espèce de pente et comme il était très long, ça butait dans le fond. Alors avec la grue on a essayé de le soulever en essayant de grignoter de la hauteur pour le faire entrer en le basculant. Mais la grue n’était pas assez lourde. Comme elle n’était pas assez forte, quand il s’accrochait à certains appuis c’est la machine qui se soulevait. Et c’est là qu’ils nous faisaient monter en grappes, on était 10-15 ; on montait les uns sur les autres pour faire contrepoids. C’était haut, ça pouvait nous tomber dessus et nous écraser. A chaque fois que le tour tombait, à chaque fois il y avait des éclats sur les pièces car il était monté en quatre parties boulonnées. Mais il fallait gagner du temps, si bien que nous l’avons cassé. »
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- Centre Régional "Résistance & Liberté"
- Archives du Conservatoire de la Résistance et de la Déportation des Deux-Sèvres et des régions limitrophes
- Pichot G., Daudin V., L'Homme à nu - Résistant déporté, Geste éditions, La Crèche, 2011
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