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Monument de Moncoutant

Dans l'élan mémoriel de l'après-guerre, la ville de Moncoutant érige un monument à la mémoire de ses administrés engagés dans la Résistance.

Les premiers résistants de Moncoutant

En 1942, les Allemands eurent la preuve de l’hostilité d’une partie de la population Moncoutantaise à l’occasion de deux incidents qu’ils jugèrent bon de ne pas dramatiser. Le premier aurait pu se terminer tragiquement. Dans un café, au cours d’une altercation avec un S.S. ivre, fanatique de son Führer, Maurice Clisson avait clairement fait comprendre, surtout par un geste expressif, qu’il considérait Hitler comme un fou dangereux. Furieux, le S.S. l’avait menacé de son revolver. Dans la semaine qui a suivit, arrêté et transféré à la Gestapo de Parthenay, Maurice Clisson subissait un interrogatoire serré. L'accusé, très calme, faisant valoir l'état d'ivresse du militaire et son comportement, réfutant l'un après l'autre tous les arguments avancés, alla jusqu'à se porter partie plaignante en parlant de provocation. Ayant eu finalement gain de cause, il demanda à être reconduit à son domicile, ce qui fut fait. Mais au terme de cette dure séance, tenant compte des nombreux détails qui venaient de lui être rapportés, Maurice Clisson avait désormais, la certitude que la Gestapo bénéficiant d'un informateur local, et qu'il était sous surveillance.

Le second incident fut provoqué, un matin, par un afflux de convocations destinées à des travailleurs susceptibles de partir pour l’Allemagne. En signe de protestation, un défilé d’environ quatre vingt personnes, drapeau tricolore en tête, fut organisé de la place de l’église au Monument aux Morts devant lequel on chanta la Marseillaise. Mis au courant de cette manifestation patriotique, une heure après son déroulement, les Allemands convoquèrent à la Kommandantur de Thouars, Henri Gourdon qui avait porté le drapeau. Ancien combattant de 1914/1918, il les impressionna par son assurance et sa dignité. L’affaire, que la B.B.C. signala quelques mois plus tard à ses auditeurs français, n’eut pas de suites fâcheuses.

En octobre 1942, Maurice Clisson et Henri Gourdon faisaient partie d’un des premiers réseaux de la France Combattante. Jean Daguisé et Fernand Gilbert se joignirent à eux. Ce petit noyau de quatre résistants, qui devait par la suite devenir un groupe important, avait été recruté par Roger Hélier de la Chapelle-Saint-Laurent. Membre de l’Organisation Civile et Militaire (O.C.M.), en liaison avec Londres, il préparait des abris pour cacher des armes et choisissait des terrains propices à leurs parachutages. Dans la nuit du 12 au 13 mars 1943, le premier parachutage d’armes a lieu sur le terrain " Villeneuve " de la commune de Neuvy-Bouin.

L’été de l’année 1943 est tragique pour les résistants de l’OCM traqués par la Gestapo. Le samedi 7 août, à la Chapelle-Saint-Laurent, cinq résistants sont arrêtés dont Roger Hélier qui, refusant de parler, est sévèrement maltraité avant d’être emprisonné puis déporté comme ses malheureux camarades.

Le lundi 9 août à 5h du matin, la Gestapo entreprend l’arrestation des quatre premiers résistants Moncoutantais très engagés dans l’action clandestine. Dès la veille, se sachant menacés, ils auraient pu quitter leur domicile. La crainte de représailles pour leur famille les incite à rester. Seul Fernand Gilbert décide de partir en se réservant la possibilité de se livrer si des membres de sa famille étaient inquiétés. Ses trois amis sont arrêtés et conduits à la prison de la Pierre Levée à Poitiers. Transférés à Compiègne en janvier 1944, ils sont ensuite déportés dans des camps de concentration.

Fernand Gilbert, le dimanche 8 août 1943, se cache dans la remise à outils de son jardin qui n’était pas attenant à sa maison. Le lendemain, il est hébergé dans une grange de La Haye de Largeasse où il reste près d’un mois. Sa femme n’ayant pas été arrêtée après avoir subi plusieurs interrogatoires de la Gestapo, il a l’astucieuse audace de venir se cacher, à moins de trente mètres de son domicile, dans un grenier d’où il sortit onze mois plus tard au grand étonnement de ses voisins.

Maurice Clisson avait participé à de nombreux parachutages et utilisé son camion, souvent en plein jour, pour le transport du matériel reçu. Aux hommes de la Gestapo, il refuse de donner le moindre renseignements, aussi est-il sauvagement battu.

Après 40 jours de cachot à Poitiers, il est déporté d’abord à Flossenburg puis à Hradisko en Tchécoslovaquie. C’est là qu’après avoir été grièvement blessé par les S.S., il est abattu le 11 avril 1945.

Jean Daguisé, après son arrestation, s’emploie à faire disculper son fermier de la Berderie de la Ronde, arrêté lui aussi, après la découverte de containers d’armes cachés dans ses tas de fagots. Pour y parvenir, il certifie les avoir placés lui-même en faisant croire qu’il mettait de l’essence en réserve et son fermier est alors remis en liberté. De Buchenwald, Jean Daguisé est envoyé à Dora puis à Ellrich. C’est vraisemblablement quelques jours avant l’arrivée des troupes américaines, au début du mois d’avril 1945 qu'il succombe.

Henri Gourdon, homme énergique et très courageux connait les horreurs de Buchenwald et de Mauthausen mais réussit à survivre aux plus terribles épreuves. En 1945, à son retour en France, apprend la mort de son fils Camille, FFI tombé dans un maquis de la Vienne.

Le tragique destin d’un jeune patriote Moncoutantais

Jacques Brack, étudiant à Paris, partit pour la Sologne le lendemain du débarquement des alliés en Normandie afin de rejoindre le Corps Franc " liberté " qui avait reçu l’ordre de se regrouper à la Ferté-Saint-Aubin pour y recevoir des armes avant de passer à l’action. Le 10 juin 1944, arrêté par les Allemands, sur une route de Sologne, avec treize autres étudiants, il est condamné comme eux à la déportation dans l'univers concentrationnaire. Il s’éteint à l’âge de 23 ans le 25 novembre 1944.

La résistance au village du Noirvault, lLa protection des réfugiés juifs

Dès l’année 1942, dans un village situé à cinq kilomètres de Moncoutant : le Noirvault, des familles juives sont hébergées grâce à Madame Noémie Fradin qui, aidée de toute sa famille et de la plupart de ses voisins, se dévoue inlassablement pour assurer leur bien-être et leur sécurité. Sa fille Eva institutrice, compte parmi ses amis, des juifs menacés par la Gestapo. Pour les sauver, elle les envoie au Noirvault. Un résistant juif d’origine polonaise prénommé Lova (aujourd’hui grand médecin spécialiste) fut le premier à y faire un séjour.

Dans le village retiré du Noirvault les réfugiés peuvent se croire à l’abri de tout danger. Au printemps de l’année 1944, des réfractaires au S.T.O. et des maquisards, dont deux belges, bénéficient eux aussi de sa chaleureuse hospitalité. Un jour, à la suite d’une dénonciation concernant l’action de Madame Fradin, deux hommes de la Gestapo, flanqués d’un interprète français, viennent enquêter à son domicile d’où elle est provisoirement absente. Dès leur arrivée, grâce à un bel élan de solidarité, trois jeunes femmes juives réfugiées et quatre enfants juifs qui fréquentaient l’école de Pugny, sont avertis du danger. Tous, ainsi que trois enfants en bas âge, sont cachés dans des refuges immédiatement mis à leur disposition dans des fermes isolées. Madame Fradin doit se rendre à Niort pour y subir un long interrogatoire. Très habilement, elle joue le rôle d’une pauvre paysanne bornée, réussissant à donner le change et à éviter l’arrestation. Dès que la voiture de la Gestapo avait été aperçue dans le village, les réfractaires et les maquisards avaient disparu dans la campagne. Peu après, ils quittaient la région sous la direction du fils de Madame Fradin, Daniel, et de Camille Gourdon, pour s’engager dans un maquis de la Vienne.

Le 4 août 1944, Camille Gourdon trouve une mort accidentelle à Lussac-les-Chateaux.

Quelques jours plus tard, au cours de l’attaque d’un convoi allemand, Daniel Fradin et son ami Jean Rousseau sont capturés. Emmenés à Compiègne, ils connaissent les effroyables conditions de travail des camps de concentration. Jean Rousseau survivra.

Daniel Fradin, après un passage à Buchenwald, est affecté dans les mines de Stassfurt. Atteint d’une maladie de la gorge aggravée par les privations et les travaux épuisants, il succombe le 1er avril 1945.

En novembre 1978, une émouvante cérémonie se déroula au village du Noirvault, en présence de nombreuses personnes venues témoigner leur reconnaissance à ses habitants. Un arbre fut planté pour perpétuer le souvenir de leur courage, de leur patriotisme et de leur dévouement exemplaire.

Le groupe FFI de Moncoutant

Après les arrestations de l’été 1943, la direction de l’OCM des Deux-Sèvres est confiée au Capitaine de réserve Edmond Proust (Gapit), plus tard Colonel Chaumette. Surmontant de grandes difficultés, il réussit à reconstituer les groupes décapités, après avoir divisé le département en six secteurs. Le 1er octobre 1943, il prend le commandement de l’Armée Secrète des Deux-Sèvres.

En 1944, à Moncoutant, des habitants qui avaient secondé les premiers résistants mais n’avaient pas été identifiés par la Gestapo, reprennent leurs activités de résistance sous l’impulsion de l’un d’eux, en particulier Camille Martineau. Grâce au concours du Lieutenant Rollet, résistant de la région parisienne réfugié à la Javrelière, le groupe démantelé l’année précédente est reconstitué et fait partie du secteur de Bressuire. De nouveaux parachutages d’armes sont organisés et des volontaires toujours plus nombreux permettent la formation d’un groupe de F.F.I. L’un d’eux Robert Robin, un des premiers inscrits au groupe, se distingue par son efficacité. Toujours plein d’entrain, volontaire pour participer à tous les parachutages et conduire le camion chargé d’armes, il affronte les dangers avec sang froid.

A la fin du mois d’août 1944, le groupe de F.F.I. de Moncoutant est bien organisé et bien armé. La plupart de ses éléments s’engagent dans les rangs du 114e régiment d'infanterie (R.I.) que constitue le Colonel Chaumette. Le département des Deux-Sèvres libéré, ce régiment se regroupe à Saint-Maixent-L’École dans les premiers jours d’octobre et va prendre position devant la poche de La Rochelle. Les jeunes volontaires de Moncoutant et leurs camarades du canton font partie du 2ème bataillon placé sous les ordres du Commandant Biojou et combattent à la 5ème compagnie commandée par le Capitaine Princay. Après l’Armistice du 8 mai 1945, ils partent en Allemagne avec leur régiment.

De nombreux Moncoutantais n’ont donc pas subi passivement l’occupation Allemande. 5 résistants ont payé de leur vie leur dévouement à la liberté.

Pour que leur sacrifice ne tombe jamais dans l’oubli, leurs noms ont été gravés sur le monument élevé à la mémoire des martyrs de la Résistance du canton de Moncoutant (*). Parmi les résistants qui n’avaient pas été identifiés par la Gestapo, il convient de citer des jeunes gens, tels J. Grolleau, P. Hélier, R. Trepant décédés de maladie ou accidentellement, en service commandé.

(*) Historique de la libération à Moncoutant - 8 septembre 1981 - Bulletin mensuel de liaison de l’Amicale du 114° R.I.

 Portraits

Daniel Fradin (1920 - 1945)Daniel Fradin (1920 - 1945)

Étudiant. Membre des Forces Françaises de l'Intérieur (FFI) du groupe " Le Chouan ". Fait prisonnier le 4 août 1944 à Lussac-les-Chateaux (Vienne). Emprisonné à la " Pierre-Levée " à Poitiers puis déporté à Buchenwald. Il est ensuite désigné pour les mines de sel de Stassfurt. Il y meurt le 5 avril 1945. Il repose dans le cimetière d'Alenya (Pyrénées Occidentales).

Jean Daguisé ( 1905 - 1945 )Jean Daguisé (1905 - 1945)

Artisan horloger. Membre des Forces françaises combattantes. Arrêté le 9 août 1943. Emprisonné à Poitiers et Compiègne. déporté à Buchenwald, Dora et Ellrich. Disparu à Norddhausen le 9 mars 1945.

Maurice Clisson ( 1901 - 1945 )

Maurice Clisson (1901 - 1945)

Entrepreneur à Moncoutant (Deux-Sèvres). Membre du mouvement Organisation Civile et Militaire (OCM). Arrêté le 9 août 1943 pour participation à des parachutages. Emprisonné à la " Pierre Levée " de Poitiers. Déporté à Compiègne, Buchenwald, Flossenburg puis dirigé sur le Kommando de Hradisko (Tchécoslovaquie). Fusillé le 11 avril1945 à Hradisko.

Jacques Brack ( 1921 - 1944 )Jacques Brack (1921 - 1944)

Étudiant. Originaire de la Région Parisienne. Il est capturé, en Sologne, par les Allemands le 10 juin 1944, avec 40 membres du corps franc " Liberté " venant rejoindre la Résistance des Deux-Sèvres. Détenu à la prison d'Orléans. Transféré à Compiègne, puis à Dachau le 2 juillet 1944, au camp de Neckagerach. Il y décède du typhus le 25 novembre 1944. Inhumé dans un cimetière Israélite près de Bineau.

René Brossard ( 1917 - 1945 )René Brossard (1917 - 1945)

Ouvrier agricole. Originaire du Breuil-Bernard (Deux-Sèvres). Membre du mouvement Organisation Civile et Militaire (OCM). Arrêté le 9 août 1943 pour détention d'armes. Incarcéré à Poitiers et transféré à Compiègne, il décède le 25 mai 1945 à Pasing (Allemagne).

En savoir plus

Sources d’informations

- Archives du Conservatoire de la Résistance et de la Déportation des Deux-Sèvres et des régions limitrophes

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